Les levures indispensables au vin
Petite je pensais que seuls les magiciens pouvaient faire du vin. Il me semblait qu’ils étaient les seuls à posséder la potion et la formule magique qui pourraient transformer le raisin en vin. Et puis, les cours d’oenologie aidant, j’ai compris que tout cela était une transformation chimique effectuée par des levures.
Malgré cela le processus d’apparition du vin n’a rien perdu de sa magie, tant ces êtres microscopiques oeuvrent clandestinement, à l’abri de notre regard.
Mais comment tout cela a lieu et d’où viennent ces ouvrières ?
Il est probablement étrange d’imaginer que lorsque le raisin est ramassé puis déposé en cuve, pressé ou non, que du vin apparaisse tout seul, sans aucune intervention humaine. Pourtant cela est possible. Bien sûr si la main de l’homme n’offrait pas son aide, le liquide se transformerait vite en vinaigre, mais contenant de l’alcool…
D’ailleurs si ça ne pouvait se faire, le vin n’existerait pas depuis tant de siècles et n’aurait pas pu longtemps remplacer l’eau.
Il est certain qu’un jour une personne, très avisée sans le savoir, a oublié quelque part du raisin dans un pot ou que sais-je et que celui-ci a tourné en une boisson alcoolisée, qui s’est avérée avoir un goût intéressant. Puis au cours des siècles les techniques de vinifications se sont modernisées, jusqu’à ce qu’un certain Mr Pasteur mette à jour l’existence d’êtres microscopiques qu’il nommera « levures« . Depuis cette découverte toutes les pratiques cherchent à améliorer les gestes oenologiques, mais surtout à protéger ces actrices indispensables à la naissance du nectar recherché.
Origine des levures
Pour les premiers jus de raisin fermentés l’origine des levures était endogène. C’est à dire qu’elles se trouvaient directement posées sur la pellicule des raisins. Après avoir extrait les jus on les retrouvait donc naturellement en suspension et c’est là qu’elles commençaient leur travail de fermentation.
Mais le devenir des jus était toujours incertain, parce qu’il existe des milliers de types de levures, même au sein d’une famille, et certaines ne donnent pas exactement le liquide que l’on souhaite boire.
L’invention du microscope par Mr Antonie Leeuwenhoek (inutile d’essayer de prononcer ce nom) et l’œil avisé de Pasteur, ont permis d’identifier ces êtres microscopiques et de leur donner le nom de levures. Il a suffit ensuite d’attendre le développement des technologies au cours du siècle passé pour permettre la mise au point de technique d’isolement de certaines levures aux propriétés intéressantes ainsi que leur multiplication.
Aujourd’hui les fermentations ne sont que très rarement menées sans ajout d’une souche de levure sélectionnée, parce que l’on veut maîtriser au maximum les fermentations. Mais heureusement certains vignerons cherchent encore à laisser la magie s’opérer toute seule. Dans ce cas, on parle de vinification avec des levures indigènes.
Comment le vin apparaît-il ?
Les levures les plus couramment utilisées pour mener à bien la fermentation des moûts de raisin sont de la famille des Saccharomyces cerevisiae. Celles-ci ont la capacité fort appréciée de transformer le sucre en alcool qu’elles rejettent ensuite dans leur milieu de développement. Prenez donc n’importe quelle substance liquide sucrée, ajoutez y des levures capables de faire la fermentation alcoolique et vous obtiendrez une boisson alcoolisée. Cela dit même si l’expérience est tentante, je vous déconseille vivement d’y goûter!
Bref, ces êtres microscopiques sont indispensables à la fabrication du vin.
Bien sûr elles ne sont pas les seuls acteurs nécessaires pour faire un bon vin, mais elles sont les seules à permettre d’obtenir de l’alcool.
Imaginez donc à quel point les vinificateurs doivent être vigilants et attentionnés envers leurs levures.
Et oui, une grande partie du travail du vin tourne autour de ces petites choses.
Tout jus de raisin destiné à devenir du vin sera analysé avant toute chose. On cherchera à savoir la quantité de sucre et d’azote qu’il contient.
Parce-que la levure transforme le sucre en alcool, on veut être sûr que les raisins en contiendront assez pour arriver à des degrés d’éthanol suffisant (sachant qu’en dessous de 9° votre boisson alcoolisée ne peut être dénommée « vin »). Cette quantité de sucre est déterminée par la maturité du raisin. C’est en général ce critère qui permettra de décider si les raisins sont prêts à être vendanger ou s’ils doivent rester quelques jours de plus sur les pieds de vigne.
Dans certaines aires de production la chaptalisation, addition de sucre de betterave directement dans les jus de raisin, est autorisée. Cependant elle est très faible et ne permet jamais de monter le taux d’alcool dans le vin de plus de 2%.
Je vous parlais également de la mesure de la quantité d’azote dans les moûts (jus) de raisin. Pourquoi l’azote, et bien parce-qu’il est « la nourriture » des levures. En effet les levures utilisent l’azote comme source d’énergie pour faire fonctionner leur métabolisme et se multiplier. Tout comme nous mangeons et buvons afin d’assimiler les vitamines et autres nutriments nécessaires au fonctionnement de notre organisme.
Si les résultats des analyses montrent une carence en azote, il sera ajouté sous forme de poudre dans les moûts.
Mais ce ne sont pas les seuls attentions que l’on porte à nos ouvrières.
Chaque jour l’évolution de la fermentation sera contrôlée, généralement par suivi de l’apparition d’alcool ou de diminution des sucres. Si un problème survient le vinificateur mettra tout en oeuvre pour aider un maximum la fermentation, c’est à dire soigner les levures.
Tout d’abord on pourra augmenter la température du liquide, parce que les levures, comme les hommes, n’aiment pas le froid. Elles ont une température optimum de développement de 28°C. Et puis elles ont besoin de respirer ces petites bêtes. Et je ne vous cache pas que ça n’est pas évident dans du liquide.
Alors on injecte de l’oxygène dans les jus par différentes techniques, le remontage, où l’on pompe les jus par le bas de la cuve pour les rejetter au-dessus (technique généralement réservée aux vins rouges, car les vins blancs craignent l’oxydation) ou encore l’injection d’oxygène directement dans les jus.
En tous cas tout sera mis en œuvre pour bichonner nos levures parce que sans elles le vinificateur peut songer à changer de métier!
Les autres atouts des levures
Les levures, en plus de permettre l’apparition d’alcool dans leurs moûts de raisins, les protègent de certains autres micro-organismes qui pourraient altérer notre nectar.
En effet, une fois que les levures commencent à se développer et pendant toute la phase de fermentation, leur population est telle qu’elle supplante le développement de toute autre bactérie ou levure non désirable.
Nous parlons ici des bactéries acétiques ou de certaines bactéries lactiques qui utiliseraient les sucres pour donner de l’acidité volatile donnant une forte odeur de vinaigre.
Les levures sont donc des ouvrières plus qu’appréciées dans la transformation du jus de raisin en vin, et quelles que soient leurs revendications pour effectuer leur travail de fermentation, je suis sûre quelles seraient toutes acceptées, tant elles nous sont indispensables à l’apparition de notre fameux nectar.
comment se procurer de telles levures?