C’est l’heure des bilans pour le salon millésime bio 2010 ! Cette année la fréquentation a augmenté de presque 50% traduisant une franche réussite. Environ 3000 visiteurs pour 500 vignerons venus exposer leurs domaines et leurs convictions. L’attrait pour les vins de producteurs en bio ne cesse d’augmenter et traduit une réalité : le bio plait ! Enfin, seraient tentés de dire les vignerons précurseurs qui ont été traités de fou à leur début. Le bio fait néanmoins polémique au sein de la profession. Certes il vient valider et certifier un travail respectueux du terroir et une prise de conscience envers la protection de l’environnement mais il ouvre aussi de nouveaux marchés aux entreprises qui exploitent ce filon. Aujourd’hui la demande des consommateurs en vin bio – enfin certifiés « issus de raisins cultivés en agriculture biologique » (courage on y arrive !) – dépasse encore très largement l’offre proposée. Or, face aux consommateurs seule la certification compte et rassure. Elle se traduit par le droit à l’adjonction du logo AB que tout le monde connait de nos jours. Il est un temps où les bonnes paroles des vignerons ne suffisent plus. Voilà une des raisons qui explique la course à la certification qui s’étale sur trois ans. Trois années durant lesquelles les rendements chutent, le travail et l’observation augmentent, et où sur l’étiquette le logo tant reconnu fait défaut.
Dans cet article, les vignerons expliquent leurs démarches, leurs motivations et donnent leur vision de l’agriculture biologique, entre état d’esprit, philosophie de travail et exigence commerciale, témoignages…
Pour présenter leurs démarches, Pierre Clavel vigneron du Domaine Clavel, Alain Chabanon vigneron du domaine éponyme, Sylvain Fadat vigneron du Domaine d’Aupilhac, Agnès et Denys Armand vignerons du Mas d’Espanet, Marie-Danièle Deniaud salariée au Château de Cazeneuve, François Caumette vigneron du Domaine de l’Ancienne Mercerie et Marc Valette vigneron du Domaine Canet Valette témoignent.
A travers ces témoignages, chacun d’entre eux nous expliquent leurs motivations et leurs cheminements. Avec le respect de l’environnement comme fil conducteur, ils décrivent leurs autres motivations, plus singulières. Ils nous expliquent aussi pourquoi ils ont franchi le pas en demandant à être certifiés par un organisme certificateur. Cette certification qui rassure les acheteurs ! Et qui offre certaine fois des opportunités commerciales en guise de cerise sur le gâteau. Enfin, ils nous expriment leurs souhaits de poursuivre cette démarche bio à la cave ou sous les principes de la biodynamie. Voici des extraits des commentaires des vignerons commercialisés chez Midi-Vin nous expliquant leur démarche agriculture biologique :
Alain Chabanon du domaine éponyme :
J’ai tout de suite commencé la culture bio à mon installation en 1990. J’ai toujours était bio dans ma tête. Ma conversion, je l’ai entamée au début de l’année 2002 à une époque où ce n’était pas encore « la mode ». Nous sommes donc 100 % bio depuis 8 ans et en transition vers la biodynamie. Mes motivations sont de respecter les gens, les sols, la Terre et ceux qui vont rester sur la Terre après nous. En plus, je trouve que les vins sont meilleurs quand ils sont issus de raisins cultivés selon les principes de l’agriculture biologique et de la biodynamie donc tout est bien dans le meilleur des mondes !
Agnès et Denys Armand du Mas d’Espanet :
Nous sommes entourés par la nature. C’est l’une des raisons qui nous pousse à travailler en bio. Nous ne voulons pas « salir » cette nature ambiante. Nous poursuivons cette démarche en cave où nous n’utilisons que très peu de produits de synthèse, non bios.
Marie Danièle Deniaud du Château de Cazeneuve :
Notre démarche passe par le respect du terroir. Cette démarche est intimement liée à l’expression du sol, et de la vigne. Elle englobe aussi une prise de conscience environnementale.
C’est ici la région certainement la plus favorable à la mise en place de cette agriculture du fait de la pression des maladies qui peut être parfois plus faible que dans les autres régions. C’est une des raisons qui explique le boom des certifications en bio et notamment en Languedoc-Roussillon.
Pierre Clavel du Domaine Clavel :
Après 25 années de pratique de la viticulture, nous avions besoin de trouver de nouvelles sources de motivations, d’autres émotions, d’autres sensations pas seulement dans les vins mais aussi à la vigne. Nous souhaitions la regarder différemment en changeant notre approche vis-à-vis d’elle. Durant toute ma vie de vigneron, j’ai accumulé des connaissances en écoutant les gens autour de moi. Je cherchais des informations sur le fonctionnement des sols. J’ai encore du mal à comprendre aujourd’hui le fonctionnement de mon sol car je n’ai pas eu de formation scientifique mais je continue à récupérer des informations précieuses à droite et à gauche. La culture bio s’est révélée être une évidence pour moi et s’inscrivez dans une démarche agrobiologique dans les vignes qui me tient à cœur. Au domaine, je lâche mes brebis dans l’écosystème et au milieu de mes vignes l’hiver. Je suis persuadé que la culture en bio fait du bien à mon sol. A cette démarche à la vigne s’ajoute une démarche environnementale que nous avons eu au domaine en étant l’une des premières entreprises privées de la région à mettre en place des panneaux photovoltaïques sur le toit de notre cave…. Je récupère aussi mes eaux usées de cave afin de les traiter et très peu de gens le font.
Aujourd’hui, ça me rend heureux de contribuer à cette démarche environnementale.
Nous serons reconnus en AB pour la prochaine vendange après trois années de certifications. Période durant laquelle je pouvais dire que j’étais en bio mais je n’étais pas encore certifié malgré le respect du cahier des charges.
Sylvain Fadat du Domaine d’Aupilhac :
Quand je me suis installé en 1989, j’ai fait la promotion du bio en pensant qu’il était naturel que tout le monde soit bio – moi y compris – surtout lorsque l’on fait du vin en appellation. Je me suis fait certifier par un organisme certificateur parce que les clients de mes clients me le demandaient et voulaient être rassurés par une certification. Moi de mon côté, je n’ai jamais mis d’engrais chimiques dans les vignes et je respecte les principes bios depuis très longtemps même si mes vignes sont certifiées bio depuis seulement 5 ans.
Gilles Azam du Domaine des Hautes Terres :
J’ai créé le domaine des Hautes Terres en 1999 et je suis en agriculture biologique depuis le début. C’était ma philosophie à l’époque lorsque j’ai repris ces vignes. Je ne suis pas non plus un intégriste ! J’aime le travail propre sans produits de synthèse.
Marc Valette du Domaine Canet Valette :
Dès 1995 je me suis mis à y penser et à être sensibiliser par le problème que représentait la culture non bio. La première approche a été d’arrêter de s’empoisonner avec les produits phytosanitaires. Et puis il y a eu l’envie de respecter son sol, de respecter le terroir. J’avais envie de faire mon propre vin en respectant ma démarche ce qui n’était pas possible lorsque j’étais en cave coopératif. Au début ce fut difficile et sans tomber dans cette philosophie bio qui me fait peur, j’ai réussi à redonner vie à mes sols. Pour moi, la culture en bio me permet de faire ressortir l’expression du terroir. On va même plus loin que la culture bio puisque l’on pulvérise des tisanes de plante sur nos vignes pour stimuler leurs défenses et que l’on dynamise à notre façon. Le bio reste un feeling, une sensibilité ! On cherche à respecter notre terroir.
François Caumette du Domaine de l’Ancienne Mercerie :
Notre conversion en bio date de 2006 et notre premier millésime certifié en AB fut 2009. Ce fut un tournant important sur le domaine et nous sommes très heureux de travailler en bio aujourd’hui. A l’époque lorsque j’étais enseignant en viticulture et en œnologie, on parlait assez peu du bio. Puis j’ai demandé à la cave où j’amenais mon raisin de faire une gamme de vin bio. C’était déjà quelque chose qui me trottait dans la tête. Puis à la vigne, je ne supportais plus l’utilisation de produits de synthèse phytosanitaires et leurs risques pour l’utilisateur et l’environnement. Je me souciais aussi du devenir des résidus de ces produits. Voilà quelles ont été mes motivations pour entreprendre une démarche de certification à l’agriculture biologique. L’avantage du bio c’est qu’il existe un cahier des charges précis et même s’il n’est pas parfait, il a le mérite d’être clair ! Il interdit les pesticides de synthèse et autorise seulement une petite quantité de produits naturels pour traiter la vigne dont on peut mesurer les effets sur l’environnement et sur l’utilisateur. L’agriculture biologique demande une gestion plus pointue en termes d’observation à la vigne. Cependant on est conscient que l’autorisation de cuivre et de soufre pour traiter n’est pas sans danger mais lorsque l’on est en bio on va essayer d’utiliser le moins possible ces solutions ce qui nous pousse à prendre des risques et parfois à sacrifier une partie de notre récolte. Néanmoins, dans le Sud on est aidé par le climat qui limite le développement de certaines maladies nécessitant des traitements pour protéger la vigne. Pour l’instant, il n’existe quasiment pas d’impasses techniques pour les maladies importantes comme le mildiou, l’oïdium, les vers de la grappe, la flavescence dorée,… On utilise aussi beaucoup la prophylaxie.