Souvent, des personnes connaissant ma passion pour le vin, m’ont demandé c’est quoi le meilleur vin du monde ?
Bien sûr, cette question semble assez innocente à celui, qui comme moi – la Prima Dona de la Viña, de la Mancha, de Conchos y Tora – possède l’omniscience du vin et, qui sais.
Pourtant je ne compte plus le nombre de fois où la question m’a été formulée.
Et pas seulement par des enfants …
Allez, avouez ! C’est ce que vous avez tapé dans la barre de votre moteur de recherche préféré et que vous êtes arrivé pour lire cet article ; )
Bien incapable de donner une réponse, j’ai souvent éludé, esquivé, élaboré une réponse évasive. Pire encore, j’y ai répondu en fonction de mes interlocuteurs et du contexte. Et tout ça, bien entendu, dans mon propre intérêt !
Le meilleur vin du monde a donc revêtu selon les époques et les endroits, bien des flacons différents. Mais après tout, pourquoi ne pas essayer de se poser la question, le plus sérieusement du monde …
Là vous vous demandez : « comment un blog aussi sérieux que Midi-Vin en est arrivé à cet écueil » ?
La première raison la voici : à l’instant, j’étais en train d’écrire un commentaire sur un article d’Arnaud à propos du Roc d’Anglade et je disais justement que c’était « un des meilleurs vins dégustés de ma vie ».
La seconde raison c’est que cela fait quelques mois que je ne suis plus votre dévoué rédacteur. Parti sous d’autres cieux c’est donc Arnaud qui me remplace dans cette tâche. Et aujourd’hui, j’avoue, tout cela me manque …
De fil en aiguille, j’ai ressorti mon dictionnaire de rimes et mon correcteur orthaugrafique pour un petit « come back ».
Mais revenons à nos moutons.
Ainsi, il faut l’avouer. Le « meilleur vin du monde » devra être bon !
Jusque là rien de surprenant.
Ceci dit c’est plus facile à dire qu’à faire.
On va rechercher la finesse, la puissance, la complexité, l’équilibre et l’originalité.
Comment l’obtenir ?
Il faut une bonne dose de terroir, du savoir faire et de l’attention, beaucoup de travail, de la rigueur et une pincée de sens artistique.
Vous l’avez bien compris, faire un grand vin c’est assembler des caractéristiques diamétralement opposées au sein d’une seule et même chose.
Mais une fois tous ces « ingrédients » réunis comment faire la différence ?
Le prix ? Certainement pas !
Je le dis une fois pour toutes : le meilleur vin du monde n’est pas le plus cher ! Ô grand jamais.
Non, le plus important ce sont VOS impressions et surtout le contexte de la dégustation.
C’est ce que les grecs appelaient le « Kairos ». Chez eux, c’est le dieu de l’occasion opportune, du « bon instant » …
Mais pour illustrer mon propos voici quelques exemples de mes meilleures dégustations et du contexte associé :
Ma première (vraie) rencontre avec le vin.
J’avais 15 ou 16 ans et je vivais alors en Afrique. Le vin que l’on pouvait acheter là-bas était en général cher, mauvais et chaud.
Un jour un ami de la famille a apporté une bouteille de Château Lagrange. Le vin avait été stocké dans un local climatisé afin d’être servi à une température plus proche des 20°C que des 30. Le plat: un kedjenou (une sorte de ragoût africain).
Bon moi je ne connaissais pas grand chose au vin. Je sortais à peine de l’enfance et j’avais encore le souvenir de cette grimace lors de ma première rencontre avec le produit.
Cette fois-ci ce fût différent, c’était même assez bon… Je me souviens de cette impression de rondeur et des arômes marqués de sous-bois, de champignon même (je précise qu’aujourd’hui je considère parfois ce caractère comme un défaut). Mais peu importe, j’avais apprécié… et compris. Enfin !
Deuxième exemple où l’on voit que l’important ne réside pas seulement dans le vin.
Pour des retrouvailles avec ma petite amie j’avais apportée une bouteille de Champagne (Mumm Cordon Rouge).
Les grands amateurs de Champagne vous le confirmeront : si le produit est bon, ce n’est pas ce qui se fait de meilleur. Et il n’était même pas frais de toute façon.
Peu importe cette dégustation reste pour moi un de mes meilleurs souvenirs… Et je vous épargne les détails.
Enfin, la fameuse dégustation du Roc d’Anglade 2003 qui m’amène ici.
Alors que je travaillais dans un prestigieux domaine de Chateauneuf-du-Pape, je décidais pour la fin des vendanges d’offrir une bouteille de vin afin de la déguster avec toute l’équipe de cave.
Offrir du vin à quelqu’un qui en fait lui-même est un exercice périlleux. Mais bien conseillé j’avais acheté cette fameuse bouteille.
Et après une journée tendue et longue, alors que nous avions rentrés tous les raisins, la pression pouvait être relâchée.
La dégustation qui en a suivie reste mémorable et le vin a passé haut la main la comparaison avec les Chateauneufs …
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Et il y a tant d’autres exemples de cette association entre un instant donné et un vin particulier.
Alors ne parlons plus d’accords mets-vin mais d’accords espace-temps-vin…