Dimanche 24 octobre se déroulait à Saint-Jean de Cuculles, la vente aux enchères des Vins du Grand Pic Saint-Loup. Commune appartenant à la Communauté de Communes du Grand Pic Saint-Loup, Saint Jean de Cuculles accueille depuis 20 ans cet événement important pour la communauté vigneronne de l’appellation.
Cette journée venait clore « Les Automnales du Grand Pic Saint Loup » marquées par une semaine de festivités et d’animations culturelles autour du vin. Dans les caveaux et les communes du territoire, différentes activités étaient proposées aux passionnés de la région mais également aux curieux de passage. Entre ateliers d’œnologie et balades vini-culturelles, les visiteurs ont pu découvrir ou redécouvrir les vins et la région du Pic Saint-Loup.
Des bouteilles et des verres
Sous la grisaille et les épisodes pluvieux, l’organisation avait déployé toute leur énergie à ériger plusieurs chapiteaux sous lesquels différentes animations allaient se dérouler. Le plus imposant était celui du salon des vins réunissant de nombreux vignerons de l’appellation. Dans une ambiance chaleureuse, un verre à la main, on dégustait les cuvées rouge, blanc ou rosé de ces vignerons qui cultivent leurs terres à une trentaine de kilomètres au Nord de Montpellier. Plus loin, se déroulait un atelier sur les cépages du Pic Saint-Loup. Une dégustation était proposée entre l’explication des particularités morphologiques et gustatives de chacun d’eux. Elle consistait à déguster les échantillons 2010 de chaque cépage fraichement vinifié avant d’être élevé ou non en barriques. Cette dégustation permettait de faire le lien entre les explications et les arômes dans le verre. Un peu plus haut, au cœur du village, derrière une grille imposante commençaient les choses sérieuses : la dégustation des lots mis en vente l’après-midi même. Loin de l’agitation du salon installé en contrebas, l’ambiance était solennelle. Chaque vigneron présentait la ou les cuvées proposées à la vente. Cette dernière allait offrir aux enchérisseurs des barriques de rouges et de blancs (livrées ultérieurement en bouteilles) mais également des lots de bouteilles des meilleurs millésimes choisis par le comité de sélection. 33 vins étaient proposés à la dégustation pour une vente totalisant 29 lots (4 lots représentaient 2 domaines).
Parmi ces nombreuses bouteilles, Midi-Vin en a dégusté quelques unes et vous propose de les découvrir.
Les choses sérieuses commencent
Il est 15 heures, sous des trombes d’eau, la salle des enchères se remplit. Jean-Marc Ravaille, président des Vignerons du Pic St Loup entame le discours de bienvenue. Depuis 1990, les ventes aux enchères se succèdent, et, fait nouveau, ce sera la première sous l’aire de la Communauté de Communes du Grand Pic Saint-Loup. En effet, cette dernière a été créée le 1er janvier 2010 et regroupe 33 communes. Les vins mis en vente sont désormais réservés à une sélection de produits du Grand Pic Saint-Loup et non plus du Languedoc-Roussillon comme les années précédentes. Ainsi, les appellations représentées sont le Pic Saint-Loup, les Terrasses du Larzac, les Grès de Montpellier et des Vins de Pays d’Oc. Thierry Poirier sera l’œnologue en charge de présenter ces cuvées au public d’enchérisseurs et Bertrand Delatour se chargera du marteau en tant que commissaire priseur. A noter que les bénéfices de cette vente iront directement aux communes de la région, sinistrées par les incendies du mois d’août.
Le premier lot en vente est une barrique (300 bouteilles) des Vignerons du Pic (cave coopérative de Saint Mathieu de Tréviers), cuvée Réserve Château d’Assas – Grès de Montpellier- 2008 Syrah, Grenache et Mourvèdre. Adjugé-vendu pour 3000 €.
Le domaine Clavel était présent et proposait à la vente une nouvelle cuvée : la cuvée » Bonne Pioche » en AOC Coteaux du Languedoc Pic St-Loup 2009. Cette cuvée (70% Syrah, 20% Mourvèdre et 10% Grenache Noir) est issue de nouvelles parcelles achetées par le vigneron à Saint-Jean de Cuculles.
Dégustation : la robe de ce vin est très pourpre, profonde. Ce vin est jeune et ça se voit. Au premier nez, le tout semble fermé avec une légère pointe de réduction. Après aération le fruité exalte, entremêlé de notes de sous-bois. L’attaque en bouche est tendue et marquée par le poivre blanc et la mûre. Une note de sève en milieu de bouche. Finale aux tanins jeunes et maîtrisés.
Un autre domaine était en association avec la famille Clavel pour ce lot : le domaine Pech Tort à Valflaunès dans l’Hérault. Ce vin a retenu mon attention. Nadège Jeanjean s’est installée depuis deux ans en tant que viticultrice. Sa cuvée « Une Bonne Etoile » AOC Coteaux du Languedoc Pic Saint-Loup 2009 est son second millésime seulement mais déjà très prometteur. Composé de 80% de Syrah et 20% de Grenache, l’élevage est exclusivement effectué en cuve ce qui laisse place à la fraicheur des cépages et du millésime.
Dégustation : Très jolie couleur pourpre, le premier nez est un peu fermé mais se révèle après aération sur des notes de fruits rouges (groseille, cassis) acidulés et d’épice (réglisse). L’attaque en bouche est acidulée, l’ensemble est bien structuré et très équilibré. La longueur dévoile toute la puissance de la réglisse.
Le lot de 144 bouteilles (72 bouteilles de la cuvée Bonne Pioche et 72 bouteilles de la cuvée Une Bonne Etoile) sera adjugé pour 1800 €.
Le Chemin des Rêves de Saint Gély du Fesc présentait sa cuvée « Gueule de Loup » en AOC Coteaux du Languedoc Pic Saint-Loup 2007. A dominante Syrah (80%), complétée par du Grenache Noir, cette cuvée a été élevée en barriques pendant 18 mois. A noter que les barriques n’étaient pas neuves afin de ne pas « imprimer » un goût boisé trop prononcé.
Dégustation : la robe est d’un rouge pourpre très prononcé, limpide. Le premier nez est d’un épicé discret. Après aération, le terroir du Pic Saint-Loup s’exprime, les senteurs de garrigues et d’épices (réglisse, poivre noir) envahissent le verre. Une pointe de balsamique (résine) termine la dégustation olfactive. L’attaque en bouche est d’une grande finesse, la rétro-olfaction est identique aux arômes dans le verre. La longueur est onctueuse et les tannins ne font qu’accompagner cette structure très bien maîtrisée. Un vin comme on les aime : typique et d’une belle structure tout en finesse. Un article sera consacré prochainement à la dégustation des nouveaux millésimes du Chemin des Rêves.
Le Clos des Augustins de Saint Mathieu de Tréviers participait avec le Chemin des Rêves à cette vente aux enchères. Il présentait un AOC Coteaux du Languedoc Pic Saint-Loup 2003, cuvée Les 2 Rogers (première cuvée du domaine), 80% Syrah, 10% Grenache Noir et 10% Mourvèdre. Elevage de 18 mois en barriques neuves.
Dégustation : Robe présentant une couleur sur l’évolution. Premier nez très agréable et typique, sur le côté sous-bois et un peu animal. Après aération, ce nez est complexe et profond. Il dégage un côté compoté de cassis ce qui ne laisse aucun doute sur la maturité à laquelle les raisins ont été ramassés. La trame aromatique est variée et l’ensemble dégage une certaine sucrosité.
L’attaque en bouche est d’une grande finesse, le milieu de bouche est un peu végétal, sans doute des restes de barriques neuves qui donnent au vin un côté très « séveux ». La fin de bouche est très longue et empyreumatique. Des notes de tabac et de fumé viennent envahir la bouche. Un ensemble sur le côté végétal du cépage, très bien maîtrisé. Un vieillissement en bouteille qui a été très bénéfique.
Les 144 bouteilles de ce lot numéro 9 (Chemin des Rêves et Clos des Augustins) ont été adjugées à 2200€.
Parmi les différents lots mis en vente, on retiendra les 5500 € déboursés pour acquérir une barrique du Domaine Haut-Lirou de Saint Jean de Cuculles. Mais la barrique d’Ermitage du Pic Saint-Loup Cuvée Saint-Agnès 2008 à Saint Mathieu de Tréviers détient le record de la journée : pas moins de 6800 €, soit près de 23 € la bouteille alors qu’en temps normal, 15 € en moyenne suffisent pour cette bouteille. Les enchérisseurs ont joué le jeu et c’est tant mieux pour les communes sinistrées.
Les 29 lots mis en vente ce jour là, auront été adjugés pour un total de 82 150€. Une somme qui permettra certainement d’atténuer les traces de la catastrophe de l’été dernier.