Actuellement, la France compte près de 300 Appellations d’Origine Contrôlée (AOC) pour le vin. Multipliez cela par chaque couleur (rouge, rosé ou blanc) puis ajoutez les lieux dits, grands crus, villages et autres spécificités locales et vous obtiendrez pas moins de 3 000 appellations clairement définies et identifiées par l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAOQ). Tout ça sans compter les AOVDQS, VDP et autres VDT.
Alors quand on dit que le consommateur a du mal à s’y retrouver c’est un doux euphémisme !
Pour résoudre ce problème de lisibilité nos têtes pensantes ont élaboré une réforme profonde du système d’appellation, au risque éventuel de dénaturer ce qui fait cette spécificité à la française. Cette réforme est dans les tuyaux depuis quelques temps mais peine à voir le jour. Et ce n’est pas un hasard si le Languedoc-Roussillon semble avoir pris une certaine avance par rapport aux autres régions.
Explications …
Le système d’appellations français est historiquement un des premiers puisqu’il date du début du XX° siècle. Basé sur « les usages loyaux et constants » son principal objectif était la défense du consommateur. En effet, à l’époque il était difficile de garantir l’origine et la qualité d’un produit. Mélanges frauduleux et falsification n’étaient alors pas rares.
Une fois le marché assainit par ces mesures (je vous laisse présager que cela ne c’est pas fait en un jour), la notion de terroir pouvait s’exprimer pleinement. On pouvait ainsi parler d’une typicité pour les vins de Loire, du Jura, de Bordeaux… Cette notion prenant toute son ampleur dans certaines régions, Bourgogne en tête, où certains terroirs/appellations sont limités à quelques centaines de mètre carrés.
Le système d’appellation a donc connu un large succès et du fait de ce succès c’est développé un nombre considérable d’appellations.
Le problème aujourd’hui c’est que, d’une part un nombre élevé d’appellations – ne reflétant pas forcément un terroir – a tendance à perdre le consommateur et que d’autre part les producteurs se plaignent des restrictions imposées par les systèmes d’appellations d’origine.
Il serait donc tentant de dire que l’AOC a vécu et de supprimer ce système obsolète – conformément aux préconisations de l’Organisation Mondiale du Commerce – pour laisser la place à un système plus libéral où le « vin de marque » serait la norme. Cependant, même si cette hypothèse est tentante et si de nombreux vins de marque peuvent justifier d’une grande qualité, il serait dommage sinon désastreux, de perdre le bénéfice du travail de dizaines de générations dans la définition et la délimitation des grands terroirs (au risque de décevoir l’OMC).
Après de nombreuses tractations il a donc été décidé de ménager la chèvre et le chou et le résultat est assez intéressant car il laisse la place aux vins de terroirs tout en permettant une certaine libéralisation des pratiques pour les autres vins.
La décision a donc été prise de repositionner les différentes appellations – Appellation d’Origine Contrôlée (AOC), Appellation d’Origine Vin Délimité de Qualité Supérieure (AOVDQS), Vin de Pays (VDP), Vin de Table (VDT) – les unes par rapport aux autres selon une organisation pyramidale (suppression de certaines appellations redondantes, différentiation par une redéfinition des pratiques autorisées…). Notons que les restrictions (rendements, cépages autorisés…) devraient être conservées – sinon accentuées – pour les appellations du haut de la pyramide (AOC, AOVDQS) qui seraient par là même remplacées par une seule dénomination : l’AOP ou Appellation d’Origine Protégée.
Et le Languedoc-Roussillon dans tout ça …
Le Languedoc Roussillon, lui, fait partie des régions où le système d’appellation d’origine est un des plus récents. Ceci s’explique sans doute par une certaine tradition orale qui fait qu’il n’y avait pas (ou peu) d’écrits pour attester des « usages loyaux et constants » (et donc pour définir des terroirs) mais également par l’orientation productiviste qu’avait pris le vignoble pendant la période des trente glorieuses.
Le Languedoc Roussillon donc, se doit d’aller de l’avant. Et c’est ce qui a été fait…
Une nouvelle définition des AOC du Languedoc-Roussillon a été mise en place.
Ainsi, au niveau régional une nouvelle appellation est née, l’ AOC Languedoc. Celle-ci, basée sur le décret d’appellation des Coteaux du Languedoc remplacera les appellations régionales du Languedoc et du Roussillon. Viennent ensuite les appellations sous-régionales (Roussillon, Limoux, Minervois, Corbières, Cabardès, Fitou, Faugères, Saint Chinian …), puis les appellations communales (Minervois-La Livinière, Corbières-Boutenac…) et enfin les crus (La Clape, Picpoul de Pinet, Pic Saint Loup, Grès de Montpellier, Terrasses du Larzac…) qui devront être accompagnés de la mention « AOC Languedoc ».
Le Languedoc Roussillon se dote donc d’une nouvelle AOC qui encadre l’existant et permet une différentiation accrue tout conduisant à une simplification du marché. Espérons que dès ce millésime 2008 les producteurs de la région utilisent ce nouvel outil.